Salut Maxime

Salut Maxime

Laurent s’est réveillé à l’heure ce matin. C’est de bonne augure pour la suite de son année scolaire ! Quoiqu’il en a l’habitude puisqu’à sept heures, il doit prendre son Biphentin. Ensuite s’amorce une routine qu’il exécute comme un robot sur une chaine de montage : faire le lit, faire sa toilette, s’habiller, me demander de lui boucler sa montre à son poignet et prendre son petit-déjeuner. Or, il y a des matins où l’on doit le ramener à l’ordre. Il suffit que son regard tombe sur un livre intéressant, une image à la télé, ou tout bonnement s’assurer que sa tablette soit rechargée à 100% pour qu’aussitôt on le perde.

Mais c’est un bon garçon. Il travaille fort à l’école. C’est-à-dire qu’il aime beaucoup apprendre. Il le fait à son rythme, même si parfois, j’ai l’impression que la Commission scolaire et le Ministère de l’Éducation cherchent à lui mettre des bâtons dans les roues parce que pour eux, aller à son rythme est contre nature. Tout ça est une autre histoire, inutile de m’étendre davantage sur le sujet avec vous. Il apprend, il aime ça, il se souvient des visages de Platon et d’Hérodote lorsqu’il les voit dans un musée au Vatican. C’est ce qui compte pour moi et pour Sophie, ma femme.

Mais c’est un bon garçon. Il ne cherche à importuner personne. Au sous-sol, il peut passer des heures à faire ses Legos. Dans sa chambre, il écoute sans relâche les CD de ses chanteurs préférés. Il chante à tue-tête. Il s’imagine en train de donner un spectacle ou d’enregistrer un album. Si bien que parfois, on doit lui demander de baisser le ton un peu. Sur du Jean-Pierre Ferland et du Antonello Venditti. Il y a des parents qui doivent se taper bien pire en termes de sonorité. Slayer par exemple. Pas chez nous.

Mais c’est un bon garçon. Il veut tout le temps aider. J’ai l’impression qu’il s’amuse à jouer au majordome dans la maison. Dès que ça sonne à la porte, il doit ouvrir. Dès qu’il y a des couverts à placer, il doit s’en occuper. Il cuisine très bien et malheur à celui ou à celle qui cherche à l’aider ! À 14 ans, il a réussi à chausser ses chaussures tout seul. Pour vous, c’est peut-être futile, mais pour nous… quelle victoire ! Ainsi va la vie avec un adolescent autiste.

Oui, il est autiste.

Là, je vous sens déçu. Oui, déçu que mon enfant soit dérangée mentalement… Désolé Maxime, mais ce sont vos mots ! Relisez votre fil Twitter des derniers jours. Vous avez traité Greta Thunberg d’autiste, dérangée mentalement. Vous vous êtes moqué de sa condition. L’avez considéré comme une être inférieure à cause de ça, uniquement parce qu’elle vous pompe l’air avec sa crainte de voir le réchauffement climatique chambouler notre existence au point de peut-être la faire complètement disparaître un jour.

Vous n’êtes pas un tartanpion qui se cache derrière un avatar pour diffamer une personnalité, Maxime. Vous êtes chef d’un parti politique et vous voulez devenir premier ministre du Canada. Vous avez été, par le passé, un ministre. Vous êtes aussi un député. Il y en a des autistes en Beauce. Des enfants, des ados, des adultes. De niveau 1, de niveau 2, de niveau 3. Vous les percevez comment, Maxime ? J’ai presque envie de vous demander si vous ne vous reposez jamais… Pour comprendre cette petite boutade, je vous conseille de regarder quelques films de Francis Veber. Un en particulier. Avec Jacques Villeret dans le rôle-titre.

Qu’une personne comme vous avec des ambitions de diriger le pays perçoive l’autisme comme tel, c’est-à-dire comme une condition inférieure, comme quelque chose de « dérangé mentalement », me fait un peu peur. Je me console par le fait que vous ne recueillez que 3% des intentions de votes dans tout le Canada (source : Léger et Léger), sauf que vos fausses perceptions sur l’autisme peuvent faire du chemin et causer du tort. Je parle bien sûr de bon nombre de vos partisans qui vous suivent sur les réseaux sociaux et qui partagent vos commentaires sans trop réfléchir à leur véracité.

Déjà midi. Mon fils mange avec Naïma, sa nouvelle amie. Une autiste comme lui. Au programme : certainement des discours à l’emporte-pièce, sans se regarder dans les yeux, jouant avec leurs doigts comme des fidgets pour calmer leur nervosité. Moi aussi, je dois manger. Ensuite, ce sera une autre rencontre chez ma physiothérapeute pour ma cheville. À 16 h 33, Laurent sera de retour à la maison. Il sonnera une fois, puis deux, trois, quatre, cinq fois, car il croit que je reste devant la porte toute la journée afin de pouvoir la lui ouvrir en l’espace d’une fraction de seconde. Il me posera encore cette question, à savoir si le dernier album de Maurane est un album posthume.

Sur ce, je vous souhaite un bon appétit, Maxime. Une bonne journée et n’oubliez pas de regarder le troisième épisode de la docuréalité Autiste, bientôt majeur. Ça joue sur les ondes de Moi et Cie ce soir à 19 h 30. On y parlera beaucoup du regard des autres… comme le vôtre.

Cordialement,

Patrice Saucier

 

 

2 réponses sur « Salut Maxime »

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  1. J’aime beaucoup votre blog. Un plaisir de venir flâner sur vos pages. Une belle découverte et blog très intéressant. Je reviendrai m’y poser. N’hésitez pas à visiter mon univers. Au plaisir.

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